La grandeur de la France au XXIème siècle

Au cours des quarante jours qui viennent de s’écouler, les Français ont vécu trois événements qui résument l’état de notre société et ouvrent des pistes pour l’avenir.

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Le premier, ce sont les attentats du 13 novembre. Ils nous ont rappelé la fragilité de la paix, les conséquences catastrophiques des interventions occidentales en Irak et en Lybie, les échecs de l’insertion dans la communauté nationale d’une partie des Français d’origine étrangère. Simultanément, ils ont montré l’efficacité des services de santé et de sécurité, la capacité du peuple français à faire face à une situation difficile, et la sympathie d’une grande partie du monde pour la France, les valeurs et le mode de vie qu’elle incarne.

Le second événement, c’est la COP 21, conférence de Paris sur le climat. L’accord obtenu le 12 décembre, grâce notamment au travail de fourmi(1) de Laurent Fabius, marque l’émergence d’une prise de conscience globale. La route sera longue et pleine d’embûches, pour réduire la pression des activités humaines sur le climat, mais les termes « citoyen du monde » ont commencé à prendre sens à Paris.

Le troisième événement, ce sont les élections régionales du 13 décembre. Elles ont confirmé l’ascension constante d’un parti qui préconise le repli de la France dans ses frontières. Même si, une fois de plus, la sagesse des Français l’a emporté, notamment dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, on ne peut s’empêcher de penser que ce scrutin sonne comme un dernier avertissement du peuple français à celles et ceux qui ont pour ambition de le diriger.

Quels enseignements pour l’avenir peut-on tirer de ces trois moments ? En positif, que la France a encore la capacité d’incarner, aux yeux du monde, des valeurs universelles, et qu’elle donne sa pleine mesure lorsqu’elle se met au service de causes qui la dépassent, comme ce fut le cas avec la COP 21. En négatif, que la société française recèle des fragilités qui ne pourront être surmontées qu’en réformant profondément le modèle économique et la fiscalité, pour donner enfin à chaque citoyen(ne) une place dans la société. Pour atteindre cet objectif, il convient d’agir simultanément sur les quatre gisements d’emploi que sont : le secteur privé, notamment les petites et moyennes entreprises, y compris le petit commerce, l’artisanat et l’agriculture familiale ; le secteur de l’économie sociale et solidaire ; le monde associatif ; le secteur public. Ce recentrage autour de l’emploi et de ses diverses sources doit impérativement s’accompagner d’une politique forte en matière d’enseignement, notamment primaire, afin de donner des bases solides à chaque enfant, tant sur le plan des connaissances que de l’esprit critique et de la citoyenneté.

La France ne peut être la France sans la grandeur, écrivait Charles de Gaulle. Pour la France, aujourd’hui, la grandeur consisterait à s’engager fortement, en étroite collaboration avec ses partenaires européens, notamment l’Allemagne, et en impliquant la jeunesse, au service de l’unification du continent européen et de la résolution des grands problèmes qui affectent l’humanité. Ainsi la France millénaire pourrait-elle démontrer qu’il est possible de concilier harmonieusement l’attachement à sa patrie, sa nationalité, avec la qualité de citoyen européen et, aussi, sur certains sujets d’intérêt global comme le réchauffement climatique, l’accès à l’eau ou le maintien de la paix, avec celle de citoyen du monde.

Philippe MAZUEL

Paris, le 22 décembre 2015

(1) Il serait plus pertinent de parler de travail « arachnéen », c’est-à-dire d’un travail d’araignée (qui tisse une toile délicate), mais cet adjectif n’est pas très usité.